SATINE | « C'est quand on est jeune qu'on doit en profiter pour faire les choses sans penser. »

A Jeanne Bonnet,

Te souviens-tu de cette petite tête blonde qui est née, il y a de cela quinze années maintenant ? Cette enfant que tu as ramené chez son géniteur en lui faisant clairement comprendre que jamais tu ne voudrais de cet enfant. Personne n'avait pensé à un prénom pour moi, je n'étais certe pas désirée. Heureusement que ma soeur était présente. « Moi, je veux qu'on l'appelle Satine. » Eut-elle prononcée lorsque je suis née. Personne n'a contesté, de toute manière personne n'avait la tête à choisir un prénom pour la petite fille que j'étais. D'après les dires de ma famille, tu es restée une année. Juste de quoi me nourrir au sein, et encore je ne sais même pas comment tu me nourrissais. Après cela tu es partie. Te souviens-tu de moi maintenant ? Ta fille, Satine. La raison pour laquelle je t'écris ? Elle est toute simple, j'avais envie que ma mère biologique sache que j'existe, que je sais qu'elle existe. J'avais envie que tu connaisses un peu ma vie, et que tu t'aperçoives de tout ce que tu as raté ici, une fois partie là-bas. Et puis, c'est où là-bas ? Serais-tu partie pour mettre un autre enfant au monde et l'abandonner ? Ou as-tu cette fois-ci fondé une famille ? Aurais-je des frères et soeurs quelque part en ce bas monde ? Mais tu n'es pas la seule à être partie... Papa aussi est partit, quoi que de lui j'ai encore des nouvelles. Et il remplit régulièrement mon compte en banque. Alors même s'il vient rarement me voir, il ne m'oublie pas. Mais contrairement à moi, ma soeur refuse de lui parler. Je crois qu'elle est blessée. Oh je sais que tu te fiches pas mal de ce que je te raconte, prendras-tu au moins la peine de lire cette lettre ? Et qu'importe ! Que tu la lises ou non, je serai de nous deux, la plus courageuse. Oui car j'aurai osé franchir le pas, t'écrire cette lettre et te l'envoyer. Comment t'ais-je retrouver ? Les pages blanches via internet, très chère. C'est fou ce qu'un simple outil informatique fait de nos jours ! Au fait j'ai quinze ans, tu dois le savoir. Enfin je crois... mais je l'ai dit au début.

Tu sais, j'ai bien vécu et ce même sans toi ! Maman, celle qui m'a élevée, a été une mère exemplaire. Marie-Jeanne Warholl, ce nom te dit quelque chose ? C'était la femme de Nicolas Descartes - le bel Adonis qui t'as mise enceinte. Aujourd'hui, ils sont divorcés. Enfin, tu l'auras deviné étant donné que je t'ai dit précédemment que lui aussi était partit. Si tu n'as pas deviné c'est que tu manques de jugeotte, et dans ce cas je ne peux rien pour toi. Tu veux savoir quelque chose de précis sur moi ? J'aime regarder Une nounou d'enfer et Notre belle famille ! Tu connais ? Tu te rappelles de la petite fille qui a choisit mon prénom ? C'est Bonnie, ma grande soeur. Elle a toujours été présente pour moi, elle l'est encore aujourd'hui. Je l'aime plus que tout au monde ! Mais cela ne m'empêche pas d'avoir des secrets que je ne lui dévoile pas. Je ne sais pas si je peux te le dire... Oh après tout, étant donné que je ne suis plus rien pour toi, je peux me permettre cette folie ! Ce n'est pas toi qui ira jouer le rôle maternel protectrice en balançant tout à ma soeur. Quand même... Je me rappelle quand j'étais toute petite, je passais beaucoup de temps à jouer dehors avec Bonnie. Elle m'habillait, comme si j'étais une poupée, et nous sortions des heures durant pour jouer dans le jardin. On faisait de la balançoire, même maintenant il nous arrive de nous accorder une pause balançoire dans le jardin. Et tu sais quoi, j'ai réussit très vite à lire en primaire, en CP. Bien qu'au début je ne voulais pas... je me rappelle piquant des colères parce que je trouvais injuste de devoir faire l'effort de lire un petit paragraphe que la maitresse ne nous avait absolument pas demandé de lire pour le lendemain. Quelle tête de mûle j'étais déjà ! Es-tu ainsi ? Je ne sais pas de qui je tiens mon caractère difficile... Bonnie affirme que j'ai un caractère bien trempé. Ça me plait, au moins je ne suis pas comme cette nunuche actuellement dans ma classe qui pleure pour un rien.

Je suis en seconde, au lycée. J'ai eu mon brevet des collèges avec brio, presque trop facile. Tu devais croire que j'étais au collège... Je suis née en début d'année, c'est pour ça que... arf non je m'égare. Oublie, retiens juste que je suis en seconde. Je ne sais pas encore ce que je veux faire de ma vie, et de l'année prochaine. Peut être un baccalauréat littéraire ? Tu as fais quoi ? Oh non ne réponds pas, tu vas encore me parler, toi aussi, de bac D ou C ou je ne sais trop quoi. Je ne comprends rien à comment c'était auparavant. Je ne fais rien de mirobolant de ma vie, comme Bonnie j'aime en profiter mais sans faire n'importe quoi. Mais contrairement à elle, j'aime essayer de nouvelles choses. Savais-tu que la vodka est amer ? Je la croyais plus fruitée... Mais avec du jus d'orange c'est rudement bon ! Arf, Bonnie n'aimerait pas savoir ça... J'ai des tas d'amis, et mes amis ont des amis. Ces amis là m'ont fait goûter à quelque chose que tu dirais peut être d'illégale. Sauf si tu es une junkie, dans ce cas tu trouverais ça cool. J'ai fumé, de la drogue seulement, le tabac je n'aime pas ça. Je trouve ça... euurk trop dégoûtant ! Mais la drogue... c'est trop marrant ! Aaah je ne devrais pas dire ça ! Tu ne diras rien ? Et puis pourquoi je m'embête à te demander ça, à l'heure qu'il est tu dois avoir déjà tout oublié de ta propre fille. Baah tant pis ! Je me prends pas la tête, je m'éclate ! The life is so cool !!! J'suis pas très douée en anglais...

Ma lettre est longue, t'ais-je tout dit ? Ma naissance, ta fuite, le départ de papa, comment maman m'a élevé, la présence réconfortante de Bonnie, mes études, mes délires d'aujourd'hui... Oui tout cela me semble parfait ! Ah une dernière chose que je tenais à te dire ! Je te pardonne. Je te pardonne de m'avoir ainsi laissée, car c'est une femme extraordinaire qui m'a élevé et j'ai comme ça une grande soeur fantastique. Je te pardonne de m'avoir oublié parce que ma vie est belle.

Au revoir Jeanne Bonnet, non, adieu Jeanne Bonnet.
Satine, qui fut un jour de mai ta petite fille